Le toucher bienveillant


Lorsque j’ai entendu cette expression pour la première fois, je suivais ma formation d’instructrice en massage des bébés. Avant même d’attaquer le sujet, les mots en eux mêmes ont profondément résonné en moi. Une composition douce, si bien pensée, une évidence… Parce qu’ils suggèrent un toucher plus conscient du bébé, une présence dans le geste. Mon instinct a vite eu sa confirmation car c’est exactement ce dont il s’agit!

 

Lorsqu’une femme est enceinte, le contact de ses mains avec son ventre est d’une grande délicatesse. Les gestes sont respectueux, doux, saisissant le sacré de la vie presque de manière primitive. Personne n’oserait s’approcher de manière brusque de cette sphère. Bien sûr, quand le bébé arrive sur terre, les parents, les proches, continuent de porter l’enfant comme l’être sensible et fragile qu’il est naturellement. 

Mais parfois, la vie quotidienne est si sportive avec un bébé que nos gestes deviennent de plus en plus automatiques. Lorsqu’on change 8 à 10 fois un nouveau-né, qu’on lui donne le bain, qu’on essuie sans cesse les régurgitations, il est difficile de mettre de l’intention dans chacune de nos gestes. La fatigue aidant, on peut ne plus ne être connecté à son propre corps et aussi à son bébé.

 

Le toucher bienveillant qui est enseigné lors d’un atelier de massage, rappelle l’importance du contact. On prend d’abord le temps de se poser, là, dans l’instant. D’être disponible, à l’écoute de son bébé. Assis par terre, tous ensemble, dans une posture d’égal à égal. Avant chaque massage, on demande à son bébé s’il souhaite être massé. On apprend à décrypter son language corporel ou plutôt, on réapprend une langue qui est innée en nous; le toucher. 

Cela à de nombreuses bénéfices pour le bébé mais aussi pour le parent qui masse. Quand on vit l’aventure parentale, on le vit aussi avec beaucoup de frustrations. On ne sait pas si on fait bien, si on fait juste. On ne se sent parfois plus à la hauteur. Prendre un moment, une fois dans la semaine ( si c’est plus tant mieux), où l’on n’est pas dans le traitement automatique d’une tâche mais dans son geste, dans le moment présent, ouvre un champ de compréhension tout nouveau. 

Le massage de son enfant, permet un moment d’échange de qualité. Le parent gagne confiance en lui et ses capacités, le corps secrète de l’ocytocine ce qui est toujours bon à prendre et cela rappelle ce lien qui était là initialement dans le ventre de la mère. Lorsque le massage est donné par le père, c’est merveilleux car il manque parfois la continuité physique dont la mère bénéficie grâce à la grossesse. Grâce au toucher conscient durant un massage, le papa va également expérimenter l’échange sous un nouveau jour. D’ailleurs, dès les premières heures du bébé, il est vivement conseillé au père de faire du peau-à-peau. Le toucher bienveillant, c’est justement un moment d’osmose, qui peut durer 5 minutes ou 15 et parfois, c’est juste poser ses mains sur le ventre de son bébé. On est engagé envers son bébé mais la pression de réussir en moins. Finalement, le massage du bébé, c’est autant donner que recevoir car le toucher est le seul sens qui soit mutuel. On peut voir sans être vu, mais on ne peut pas toucher sans être touché. Il s’agit d’une nourriture affective qui est essentielle pour le bon développement du nouveau-né et dans le ressenti du parent.

 

Je me souviens, lors de ma formation auprès de l’IAIM, nous avions fait un exercice qui m’avait énormément marqué. Nous étions en binôme et j’étais assise sur une chaise avec une collègue debout, dans mon dos. Elle posait ses mains sur mes épaules alors que j’avais les yeux fermés. Nous sommes restées ainsi plusieurs minutes. Au début, ce contact était étrange pour moi mais avec les secondes qui passaient, j’étais de plus en plus en à l’aise au point d’avoir l’impression de ne faire qu’un avec elle. C’était vraiment relaxant et pourtant, c’était juste deux mains posées sur mes épaules. Ensuite, elle devait retirer ses mains et nous devions observer la sensation de rupture du lien. Je me suis sentie lâchée d’un coup avec une impression de froid. Ce n’était pas du tout agréable. 

 

En conclusion, le but de l’exercice était de nous montrer comment un bébé peut se sentir suite à 9 mois au chaud ou lorsqu’il perd justement ce toucher initial. Nous sommes des êtres sensoriels et sociaux. Ce contact n’est pas juste là pour un effet relaxant ou bien-être mais il est une question de survie au départ. Je perds le lien, je risque de mourir. Je suis en lien, je suis en sécurité. Il est donc intéressant dès le départ, d’amener des moments de toucher en pleine conscience et… en pleine présence. Et si vous aviez encore un doute quant aux bienfaits des massages, je vous mets une liste non exhaustive.